Quand Parkinson devient Art
Quand Parkinson devient Art

Quand Parkinson devient Art

La maladie de Parkinson est souvent synonyme de perte : perte de mouvements, perte de fluidité, perte d’autonomie, perte d’envie, etc. Mais, de manière inattendue, la maladie de Parkinson révèle parfois un côté artistique chez la personne atteinte. Cela peut émerger à travers la musique, la peinture, l’écriture, la danse ou d’autres formes d’arts.

Une créativité médicamenteuse ?

L’hypothèse la plus courante pour cette « explosion » de créativité chez le patient traité pour la maladie de Parkinson est que ce phénomène serait lié aux médicaments. En effet, la dopamine intervient dans différents circuits dans le cerveau parmi lesquels les circuits de la motivation et de la récompense. Ainsi, quand une expérience positive est vécue ou réalisée, le cerveau libère de la dopamine créant ainsi une sensation de plaisir. Et l’administration de médicaments pour lutter contre la maladie produit justement de la dopamine, activant ainsi les circuits précédemment cités ainsi que celui de la créativité.

Cela se traduit, jusqu’à 20 % des personnes atteintes selon une étude suisse, par une découverte d’un talent artistique chez la personne malade. Et pour les malades qui « étaient » déjà artistes avant le diagnostic, une modification du style ou une augmentation de la production peut être observée.

Cette implication des médicaments dans le développement de la créativité semble être corroborée par les malades de parkinson qui ont opté pour la SCP (Stimulation Cérébral Profonde) et qui n’ont pas de traitements médicamenteux conjoints. Chez ces derniers, nulle augmentation de la créativité voire le contraire.

La question légitime qui peut se poser est de savoir si la maladie et son traitement libèrent une créativité contenue ou si elle la modifie.

Aussi une thérapie

Outre cette créativité exacerbée, l’art peut aussi faire partie de la thérapie non-médicamenteuse au même titre que le sport. Bien que certains symptômes posent problème pour l’exercice d’un art, cela permet de travailler sur le contrôle moteur de son corps et de ses membres ainsi que sur la plasticité cérébrale. Plusieurs études ont démontré les bienfaits de l’art-thérapie tant sur l’aspect physique, avec des améliorations de l’équilibre et de la coordination, que sur l’aspect émotionnel avec une réduction de l’anxiété et un bienfait sur la dépression. D’ailleurs, Pablo Picasso avait déclaré que « l’art lave notre âme de la poussière du quotidien » et cela s’applique bien à Parkinson. Il ne faut pas oublier aussi que cela permet aussi de créer du lien social, problème récurrent chez les malades de Parkinson.

L’art comme témoignage

L’exercice d’un art quand on est atteinte de la maladie de Parkinson peut aussi servir d’exutoire et de témoignage. Au lieu de masquer les erreurs et imperfections dans les œuvres créées par des artistes « parkinsoniens« , celles-ci sont mises en exergue comme marque de fabrique ou style propre à l’artiste.

De même, les techniques classiques utilisées dans la création d’œuvres artistiques doivent souvent être adaptées en fonction des principaux symptômes de la maladie comme la lenteur, la rigidité et les tremblements. Cela peut être l’occasion de découverte de nouvelles techniques, de nouveaux outils, mais également l’occasion de partage de connaissances.

Les œuvres réalisées peuvent être aussi analysées pour détecter la maladie de Parkinson. Cela n’a pas encore effectué de manière préventive, mais une étude réalisée en 2017 sur 2092 toiles de 7 artistes a mis en évidence l’apparition de modifications de la technique chez les artistes atteints par Parkinson ou Alzheimer. Ainsi, ce sont les toiles de Salvador Dali, Norval Morrisseau, Willem de Kooning et James Brooks qui ont été étudiées du côté des malades, et celles de Marc Chagall, Pablo Picasso et Claude Monet à titre de comparaison avec des artistes « sains ».

L’étude a utilisé la méthode d’imagerie numérique dite « fractale » qui permet d’étudier le niveau de complexité d’une peinture et qui est déjà utilisée pour distinguer une peinture authentique d’une imitation/copie.

Pour De Kooning et Brooks, l’étude a montré une forte baisse de la complexité de leurs œuvres dès l’âge de 40 ans alors que De Kooning a été diagnostiqué avec Alzheimer à l’âge de 85 ans et Brooks à 79 ans. Pour Dali et Morrisseau, le déclin a commencé vers 60 ans sachant que Dali a diagnostiqué à 76 ans et Morrisseau à 65 ans. Pour Chagall, Monet et Picasso, les artistes sains de référence, c’est le contraire qui s’est produit avec une augmentation de la complexité de leurs œuvres plus l’âge avançait.

L’art pour changer le regard

Comme abordé précédemment, l’art dans la maladie de Parkinson est aussi un moyen de tisser des liens sociaux. Cela peut se faire lors d’atelier avec la rencontre d’autres artistes, mais cela peut aussi se réaliser lors de projets collectifs ou d’expositions.

De même que certains exploits sportifs, l’art peut servir de message positif vers d’autres personnes malades, que ce soit Parkinson ou une autre pathologie. Cela peut inspirer, motiver, et même changer le regard des autres sur la maladie.

Pour finir

Ainsi, l’art est tout autant une activité de loisir qu’une thérapie et que même si les gestes ne sont pas parfaits, ils ont le mérite d’être réalisés et, surtout, que l’envie de créer existe toujours et peut simplement se cacher derrière des gestes intempestifs et incontrôlés. Sénèque disait que « ce n’est pas parce que les choses sont difficiles que nous n’osons pas, c’est parce nous n’osons pas qu’elles sont difficiles« .

Il serait peut-etre intéressant que cette démarche artistique ait pleinement sa place dans le parcours de soins du malade de Parkinson.

sources : institu du cerveau, parkinson.ch, France Info, Ouest France, APA PsycNet

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